Bonjour, c’est Baptiste Cogitore

Je suis auteur et réalisateur, mais je me définis aussi volontiers comme journaliste, bien que je ne collabore plus que rarement avec des médias. Diplômé du CUEJ (école de journalisme de Strasbourg), j’ai travaillé autrefois comme reporter d’images pour France Télévisions, Arte ou encore pour une défunte émission politique de Canal + : c’était juste avant la « reprise en main » (sic) de la chaîne par Bolloré ! Je travaille aussi depuis vingt ans avec le collectif Rodéo d’âme, que j’ai cofondé avec Claire Audhuy. Installée à Strasbourg, Rodéo d’âme est à la fois une compagnie de théâtre et une maison d’édition dédiée aux « écritures du réel ». Regroupant artistes, journalistes, auteurs et autrices, nous tentons de raconter le monde tel qu’il est, en faisant un pas de côté par rapport au traitement médiatique habituel. C’est pour ça qu’à Rodéo d’âme, on aime bien Kometa !


Mon travail

Dans mes livres et mes films, j’ai beaucoup travaillé sur la dimension politique de la mémoire : sur les lieux de mémoire, les mémoires collectives, les « narratifs » contradictoires et l’instrumentalisation de l’histoire par la propagande mémorielle. Dit comme ça, on pourrait croire que c’est très lourd et vraiment compliqué, mais en réalité c’est très concret et parfois assez étonnant. 

Par exemple, comment est-il possible qu’on ait installé près de la ville tchèque de Lety, à l’endroit même où se trouvait dans les années 1940 un camp de concentration pour Roms, une porcherie industrielle ? Comment une synagogue alsacienne peut-elle devenir une fabrique de choucroute ou un cinéma d’art et essai ? Qu’ont à nous dire les derniers survivants du camp nazi du Struthof (en Alsace) ? Que faire des vieilles statues de Lénine qui encombrent une partie de la mémoire ukrainienne ? 

En 2014, j’ai sillonné pendant plusieurs mois l’espace postcommuniste européen pour explorer ces mémoires plurielles. J’en ai tiré une série de reportages (www.bullitour.eu) et un livre : Aux frontières de l’oubli. J’ai aussi arpenté visuellement les champs de bataille de la Grande Guerre et enquêté sur le devenir des anciennes synagogues d’Alsace (Les Gardiens des lieux). En 2023, j’ai raconté dans Beyrouth et autres îles un voyage à travers le Liban contemporain. C’était avant l’embrasement généralisé de la région, avant le massacre terroriste du 7 octobre commis par le Hamas soutenu par le Hezbollah libanais, avant la destruction totale et systématique de Gaza par l’armée israélienne aux ordres d’un gouvernement génocidaire, bref, c’était dans le « Liban d’avant »…

Sinon, j’aime rencontrer les gens en tête à tête autour d’une tasse de thé pour écouter leurs histoires. J’adore aussi me déconnecter radicalement et aller me planquer dans des endroits loin de l’agitation du monde, éventuellement pour écrire de la poésie que personne ne publiera : refuges de montagne, forêts profondes, phares insulaires ou abbayes en ruine… ce genre de lieux.

Mon article dans Kometa : L’enfant comète de Terezín  

En 2011, j’ai croisé la trajectoire stupéfiante d’un très jeune poète sous la forme d’un vaste corpus d’archives conservé dans un mémorial tchèque. Hanuš Hachenburg fut déporté à 13 ans dans le ghetto juif de Terezín (Theresienstadt). Quand on découvre un auteur si puissant, si lumineux, dont les textes nous sont parvenus par miracle à travers la nuit concentrationnaire, on ne peut pas continuer sa route comme si de rien n’était. Alors, avec Claire Audhuy, j’ai fait deux fois le tour du monde pour rencontrer des témoins qui se souviennent de Hanuš. 

Arrivée d'une famille de déportés à Terezín, revue clandestine Vedem Mémorial de Terezín

Je lui ai consacré un film documentaire (Le Fantôme de Theresienstadt) et un livre qui raconte son histoire à la manière d’un récit personnel, ou d’un « roman sans fiction » : L’Enfant comète (Plon/Rodéo d’âme, paru au printemps 2025). Mon article dans Kometa donne un bref aperçu de cette histoire que j’essaie de faire connaître depuis près de quinze ans. À chaque fois, j’ai l’impression de partager une lumière, de transmettre le feu, de garder ce garçon vivant, malgré tout. En 1943, Hanuš écrivait : « Aujourd’hui, je me suis dit que le cœur est un feu, et je n’ai pas la force d’éteindre ce feu. »

Un article à retrouver dans le numéro 9 de Kometa


L’info que j’ai retenue pour vous 

Le portrait d’un ami psychiatre strasbourgeois dans Rue89 Strasbourg : Georges Federmann milite depuis des lustres pour la paix ici et ailleurs, pour une hospitalité inconditionnelle et pour une médecine plus humaine. Sur Georges et ses patients, allez voir le film de Swen de Pauw, Le Divan du monde : bouleversant !


La date qui m’a marquée

Le 18 décembre 1942 : fondation de la « République de ŠKID », un régime imaginaire et autogéré par 40 garçons tchèques de la chambrée 1 du ghetto de Theresienstadt. Elle n’a jamais été officiellement dissoute. Sa devise : « Chaque homme est notre frère » !


Une raison d’espérer

L’apparition et le maintien de « tiers-lieux » qui sont comme d’essentielles « oasis de fraternité » (Edgar Morin). On y mange, on y lit, on y écrit et on y partage sa vie en refaisant le monde : Le Bruit qui court (Kaysersberg), L’Atelier 152 (Schiltigheim), L’École Buissonnière (Montigny-en-Gohelle), La Turmelière (Liré-Orée d’Anjou), les librairies-cafés Bonny & Read (Argentat-sur-Dordogne), L’Angle Rouge (Douarnenez), Youpi ! (Avignon), etc.


Le livre que je recommande

Pour un livre très accessible et formidable sur le ghetto de Terezín, lisez Une île, une forteresse, d’Hélène Gaudy !

Et n’importe quel livre des éditions Gallmeister

Photo prise par le délégué du Comité International de la Croix-Rouge, crédule de la propagande nazie lors de sa visite à Terezín en 1944 CICR


Le film que je recommande

From Ground Zero, un ensemble de 22 films réalisés par des Gazaouis au début des bombardements sur l’enclave palestinienne. Dans l’un d’eux, un homme raconte d’une voix parfaitement égale qu’en 24 heures, il a été extrait par trois fois des décombres d’immeubles bombardés par Tsahal. On peut voir ce film ici.


Une phrase qui m’inspire

L’un des exergues de L’Enfant comète : « La littérature crée la possibilité d’une parole vraie d’être à être, en échappant aux fantômes. » (Franz Kafka, Lettre à Max Brod 25 octobre 1923)


La "reko" de Kometa

Dans La collision (Gallimard,2025) de Paul Gasnier, le drame vécu par le journaliste devient le point de départ d’une réflexion sur le deuil et le pardon. En retraçant le parcours du jeune motard qui a tué sa mère et en confrontant leurs deux familles que tout oppose, Paul Gasnier raconte une collision intime mais aussi sociale : celle d’un pays où les fractures grandissent, alimentées par les silences et les rancunes.

Comme dans Kometa #9, il s’agit de comprendre comment les histoires façonnent nos vies, nos blessures et surtout d'initier des chemins de pardon.


A propos de Kometa

Née du choc du retour de la guerre sur le continent européen, Kometa raconte le monde partout où il bascule, de l’intérieur, à travers les regards de celles et ceux qui le vivent.

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