Aux animaux la guerre
L’invasion russe en Ukraine n’affecte pas que les personnes prises au piège des missiles, des drones et de l’artillerie. Elle modifie la qualité de vie, mais aussi celle de l’air, du sol et de l’eau. Ses victimes ne sont pas seulement les êtres humains, mais également le monde vivant et non vivant qui nous entoure. Dans mon article pour Kometa, j’analyse comment la guerre a bouleversé la vie des animaux, domestiques et sauvages, en Ukraine.
On a souvent tendance à mesurer la guerre au nombre de maisons, de villes et de villages détruits, au nombre de soldats et de civils tués. Mais elle se mesure aussi aux dommages infligés à la planète Terre elle-même. Au Moyen Âge, les humains étaient moins en capacité d’infliger aux animaux ou à la flore, les ravages qu'ils causent aujourd'hui avec les armes de destruction massive, les armes chimiques, et tout simplement les missiles et drones surpuissants capables de brûler et de détruire toute vie dans leur rayon d'action.
Des centaines de Bakhmout
En 2023, je me souviens d’avoir vu s’arrêter dans le quartier du Podil, à Kyiv, un autocar rempli de chiens et de chats rapportés de la zone des combats. Des volontaires étaient partis les récupérer sous les tirs d’artillerie dans les villages abandonnés et en ruine. Ils les ramenaient à la capitale dans l’espoir de dénicher de nouveaux maîtres. Devant le véhicule se forma tout de suite une file de plusieurs dizaines de personnes. Tous les chiens et les chats trouvèrent preneur.
J’ai plusieurs fois rencontré des chiens ramenés de la zone des combats et baptisés en l’honneur des villes d’où ils venaient : Bakhmout, Marik (pour Marioupol)… La majorité de ces bêtes, en plus d’une nouvelle vie, reçoivent de nouveaux noms, car on ignore comment leurs maîtres disparus les appelaient. On ne saurait pour autant accuser ces derniers de cruauté ou d’indifférence. Au début de la guerre, on ne laissait pas les personnes évacuées monter dans les cars ou les trains avec leurs animaux de compagnie.

Ferme de Zelenyi Hai, dans la région de Dnipropetrovsk, dans l'est de l'Ukraine. Igor, 8 ans, s'est rendu avec ses parents pour une visite guidée dans ce lieu devenu un refuge pour les animaux évacués des zones de conflit à travers le pays. — © JĘDRZEJ NOWICKI
L’harmonie par les bêtes
Les habitants qui fuyaient les régions menacées devaient choisir : rester chez eux avec leurs petits compagnons et risquer d’être tués, tenter de partir à pied avec eux, ou les abandonner. Plus tard, les règles ont été assouplies. À présent, quand on organise une évacuation, on propose aux habitants de l’est et du sud de l’Ukraine de prendre avec eux chiens et chats, et l’État ou les volontaires apportent une aide appropriée à ceux qui possèdent une ferme.
Les animaux ont toujours suscité et continuent de susciter en moi des émotions positives. Lorsque nous allons dans notre maison de campagne, les chats du voisin accourent aussitôt. Les chiens nous accueillent toujours de joyeux aboiements. La présence des animaux domestiques contribue à l'harmonie de la vie rurale. Pour ma part, je n’ai pas d'animaux de compagnie, car je voyage fréquemment. Mais sur mon ordinateur, que j'emporte toujours avec moi, je conserve des photos de tous les chiens et chats avec lesquels nous avons tissé des liens au village.